un article publié dans la Libre Eco du 20 avril 2024
M. Dupont est locataire d’une maison dans laquelle il a installé un bureau et y exerce de temps à autre ses activités professionnelles. Il souhaite donc déduire au titre de frais professionnels une partie du loyer et des avantages locatifs qu’il paye.
Dans sa prochaine déclaration, M. Dupont devra déposer l’annexe n° 270 MLH qui mentionne un certain nombre d’éléments : adresse du bien, identification du bailleur, montant des « indemnités locatives » payées au cours de l’année considérée et la partie du bien déduite à titre professionnelle, c’est-à-dire le pourcentage représenté par la surface du bureau dans la maison.
Cette nouvelle obligation concerne tout locataire qui entend déduire le loyer payé ou une partie de celui-ci, qu’il s’agisse d’une personne morale ou d’une personne physique à partir de l’exercice d’imposition 2024. Dès que la case 1072 ou 2072 est cochée, vous aurez accès à un lien vers l’annexe à remplir.
Cette obligation connaît des exceptions
Ainsi, lorsque le bail est soumis à la TVA et qu’il donne lieu à la rédaction d’une facture ou que le contrat de bail a été enregistré gratuitement.
C’est là que les locataires qui font du télétravail devront être attentifs : les baux de résidence principale affectés exclusivement au logement d’une famille ou d’une personne seule peuvent être enregistrés gratuitement, ce qui n’exclut pas la possibilité d’exercer une activité professionnelle dans le bien mais exclut par contre la possibilité de déduire le loyer ou une partie de celui-ci à titre professionnel, que le bien soit situé en Belgique ou à l’étranger.
Si M. Dupont loue à l’année une villa à la Côte d’Azur destinée à un usage familial mais qu’il y emmène son ordinateur pendant que ses enfants s’ébrouent dans la mer, le loyer ne pourra pas être déduit, même partiellement, au titre de frais professionnel parce que ce bail pourrait être enregistré
Quid en ce qui concerne l’usufruit ?
L’usufruit, le droit de superficie ou d’emphytéose peuvent également donner lieu au paiement d’une indemnité ou d’une redevance.
Ainsi, l’usufruitier qui verse une indemnité au nu-propriétaire pourrait vouloir déduire ce paiement de ses frais professionnels. Il devra désormais se conformer également à l’obligation de déclarer ce paiement dans une annexe à sa déclaration fiscale.
Obligation élargie pour les personnes morales
L’obligation de rédiger l’annexe à la déclaration fiscale concerne tant les personnes physiques que les personnes morales. Si les personnes physiques y sont tenues quand elles souhaitent déduire les indemnités au titre de frais professionnels, les personnes morales semblent devoir ajouter l’annexe dès qu’elles ont la qualité de locataire, usufruitière, emphytéote ou superficiaire, même si elles ne versent aucune indemnité déductible de leurs revenus. On ne voit guère quelle conséquence craindre si elles s’abstiennent de cette nouvelle obligation.
Concrètement
L’annexe doit être jointe à la déclaration et pas simplement tenue à la disposition de l’administration. Par ailleurs, si deux conjoints ou cohabitant légaux déduisent chacun une partie du loyer, ils devront joindre deux annexes à leur déclaration commune.
Si M. Dupont loue un bien meublé, on considère que 2/5 du loyer global est réputé couvrir les meubles. Si le bail est clair et comporte deux indemnités distinctes, l’une pour le bien immeuble, l’autre pour les meubles, seul le loyer versé pour l’immeuble doit être déclaré. Par contre, quand un seul montant est prévu, la loi est muette mais il semble de bonne mesure de pouvoir appliquer la règle des 2/5 visée ci-avant.
Enfin, M. Dupont va peut-être déménager pendant l’année et louer un nouveau bien dont il entendra également déduire une partie du loyer à titre professionnel. Il devra alors remplir deux annexes, une par bien immobilier.
Un service public ?
Certes, cette nouvelle obligation a le mérite de protéger les propriétaires des mauvaises surprises lorsque leur locataire décide de déduire tout ou partie de son loyer si l’occupation professionnelle lui est interdite par son bail.
Mais il n’échappera à personne que la nouvelle annexe obligatoire est surtout une manière de faciliter le contrôle par le fisc, tant des sommes déduites par les locataires que des revenus à taxer chez les propriétaires. Comme l’expérience le montre, le service public dont le ministère des Finances se vante dans son intitulé (SPF Finances) est moins un service « au » public qu’un service « à la » puissance publique.
Anne-Thérèse Desfosses – avocat
WBGJ – atd@wbgj.be
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